La Peur d’Écrire

 

Je ne sais pas si c’est parce qu’on est en plein NaNoWriMo (National Novel Writing Month) et que de ce fait je vois passer dans mes réseaux de nombreuses publications sur ce thème, ou si c’est simplement le fait de débuter un nouveau mois qui m’apporte l’envie de prendre de bonnes résolutions (ou peut-être est-ce un savant mélange des deux ?), en tout cas j’ai décidé de vous livrer cet article un peu plus personnel (et donc forcément un peu plus risqué) sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur : écrire, et surtout la peur d’écrire. J’espère qu’il trouvera de l’écho chez vous, dans vos expériences propres, chez tous ceux qui ont un projet, un rêve, ceux qui écrivent, ceux qui créent, qu’ils soient déjà allés au bout de leur ambition ou qu’ils n’aient pas encore osé se lancer.

Écrire… cette passion qui me tient depuis que je suis gosse. Je l’ai expérimentée sous de nombreuses formes, avec toujours cette certitude que j’étais faite pour ça, pour écrire, raconter des histoires, et que d’une certaine manière c’était fait pour moi aussi. Et puis un jour, sans trop savoir pourquoi, on perd ce petit don, ce quelque chose, cette assurance et cette confiance naïve en ce qu’on fait, ça se fait progressivement, on se met à douter, à se poser des questions… jusqu’à se réveiller un beau jour en ayant oublié pourquoi on avait aimé ça, écrire, et pourquoi on n’y arrive plus. Je me suis réveillée il y a quelques semaines. 

 

Petite histoire de mon rapport à l’écriture

Comme je vous le disais juste au dessus, j’aime écrire et raconter des histoires. J’en ai  beaucoup écrites pour ma petite sœur et c’était d’ailleurs une de nos occupations préférées: se lire nos histoires aussitôt après les avoir terminées. En grandissant j’ai gardé ce goût pour l’écriture, j’ai tenu plusieurs blogs dans lesquels je postais régulièrement des chapitres de fictions, à l’époque heureusement révolue où Skyblog était à la mode (et non, je ne vous donnerai pas les adresses des blogs en question, c’est un secret honteux que j’emporterai avec moi dans la tombe !), j’ai écrit un grand récit de fantasy de plus de cent pages (pour moi c’était déjà beaucoup)… et à partir du lycée, et plus encore durant mes études secondaires, j’ai commencé à perdre confiance, sans raison véritable, à me dire que ce que j’écrivais n’était pas assez bien, pas assez intelligent, pas assez original, pas assez « adulte », bref, jamais assez. Et progressivement j’ai perdu l’envie. J’ai commencé à avoir honte, ce qui est idiot bien-sûr, de ce que j’aimais le plus faire, ne me sentant jamais à la hauteur (mais d’ailleurs… à la hauteur de quoi ??), pensant sans cesse à ce qu’on pourrait bien dire de moi et de mes textes, et perdant ainsi toute notion de plaisir, jusqu’à arrêter complètement. Pendant deux ans.

Et puis j’ai voulu m’y remettre, puisqu’après tout écrire était tout ce que je souhaitais vraiment faire, ce pour quoi il me semblait que j’étais faite, sauf que trop tard : le blocage s’était installé. Bien-bien installé. Ce qui avait été si naturel pour moi était devenu une sorte de punition. J’avais cette nouvelle histoire à raconter qui me trottait dans la tête, et pourtant impossible d’écrire vraiment, je me décourageais avant même d’avoir essayé, l’inspiration s’essoufflait vite, je produisais pour écrire des choses simples et en petites quantités des efforts mille fois supérieurs à ce que je pouvais tirer de satisfaction en échange, et je constatais bien malgré moi que j’avais perdu cette insouciance et cette liberté qui me permettaient, à douze ans, de noircir une dizaine de pages par jour.

Je me suis dit un nombre incalculable de fois « je ne suis pas faite pour ça finalement, je me suis trompée. Je me suis trompée. » Et oui, j’ai laissé tomber. Puis, au bout de quelques mois, j’ai voulu recommencer. Puis laissé tomber encore. Et ainsi de suite pendant encore deux ans.

 

Etape 1 : la prise de conscience.

Ça me rendait malheureuse, vous ne pouvez pas savoir. Écrire, tout ce que j’avais jamais voulu faire, tout ce que j’avais jamais vraiment aimé, ça m’échappait, et voilà que j’avais perdu apparemment ma facilité, mon talent, mon appétit pour ça, appelez-le comme vous voulez, j’avais perdu « le truc ». Horrible constat. Penser à l’écriture était devenu extrêmement douloureux. Ça me faisait me sentir comme une moins que rien, une ratée, la fille qui a raté le seul truc qui l’intéressait vraiment. Je me suis convaincue de cette idée, je m’y suis presque forcée. Sauf que, plus j’essayais de faire entrer cette idée dans ma tête, plus c’est une idée inverse, contradictoire, profondément réfractaire qui prenait sa place. Et donc j’ai fini par refuser mon auto-condamnation, j’ai abandonné l’idée d’abandonner. Le blocage ? Je vais m’en débarrasser. Mes peurs, mes doutes ? Je vais m’en libérer. Et plus gros sera l’obstacle, plus audacieux sera le défi, et plus belle la victoire.

Bon, vous me direz, la plus importante des étapes est déjà passée puisque j’ai déjà décidé de ne pas renoncer à ma passion et d’affronter les difficultés. Et vous avez bien raison, mais tout de même, il reste du chemin à faire (mon dieu, cet article va être bien trop long).

 

Etape 2 : identifier l’origine du blocage.

Pour commencer donc, il a fallu identifier d’où viennent les peurs, d’où vient le blocage: c’est en identifiant la source du problème, les comportements contre-productifs, qu’on peut ensuite trouver les solutions efficaces et adaptées.

ecrire 2Pour ma part, le principal problème vient d’un défaut de confiance en soi : j’accorde trop d’importance, et ça ne vaut pas que pour l’écriture malheureusement, à ce que peuvent bien penser les autres, et j’ai tendance à trop me comparer : untel avait écrit son premier roman à 17 ans alors que moi j’en ai déjà 22 (damn, presque 23!), une autre arrivait à écrire tant de pages par jour… etc, donc forcément, je ne pouvais que déprécier mon travail et me sentir trop inefficace. Si je n’arrivais pas à tenir ce genre de rythme effréné, ça voulait bien dire que finalement je n’avais pas de talent et que je ne serai jamais capable de faire quelque chose de bien, n’est-ce pas ? (Spoiler : NON.)

Mon second problème découle, il me semble, d’un sévère manque de discipline : quand j’ai envie d’écrire, quand je sens l’inspiration qui arrive, je me dis que j’écrirais plus tard, parce que là tout de suite j’ai forcément une bonne excuse pour ne pas m’y coller, et donc je retarde, je retarde, pour ne finalement rien écrire du tout pendant des jours, des semaines, des mois (oui, je suis passée maître dans l’art de la procrastination !), et quand je veux m’y remettre, quand plus tard je pense à mon début de roman qui attend toujours que je daigne m’occuper de lui, je culpabilise de l’avoir laissé de côté si longtemps, ça ajoute à la pression pour écrire que je m’inflige déjà, ça augmente ma peur de ne pas y arriver … et je m’installe dans un cercle vicieux.

Mais mais mais ! Maintenant que l’origine du blocage est identifiée, je suis prête à agir et à briser le cercle !

 

Etape 3 : trouver les solutions adaptées.

Exprimer mes peurs et les formuler en les couchant sur le papier m’a aidé à y voir plus clair, et il est à présent plus simple de trouver des solutions.

Tout d’abord, et cela vaut tout particulièrement si comme moi vous rencontrez des soucis d’organisation et de motivation : s’imposer une sorte de discipline, une hygiène de vie intellectuelle et créative propre à vos besoins. Accordez-vous du temps pour réaliser ce que vous souhaitez, gardez dans votre journée, dans votre emploi du temps, un espace rien que pour ça. Le matin au réveil, le soir après une longue journée… peu importe, c’est selon vos préférences. Ritualisez ce moment dédié à votre passion, et apprenez à apprécier cette petite discipline personnelle qui vous aidera à débloquer, progressivement, le nerf créatif.

Si possible, créez-vous un petit espace, une bulle dans laquelle vous pourrez vous immerger lors de vos sessions de création. Pour ma part, j’ai installé une petite table dans ma chambre sur laquelle je retrouve tout le matériel nécessaire, selon un désordre étudié : pile de carnets de notes dans le coin gauche, appuyés contre le mur, pot plein de stylo, bloc note et ramette de papier, trousse, une petite lampe qui disperse une jolie lumière sur le papier lorsque j’écris…

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Une partie de ma collection de carnets.

Aussi, choisissez la méthode et le support qui vous conviennent le mieux, pas forcément ceux qu’on vous a conseillés : un temps, j’ai essayé d’écrire sur mon ordi directement, c’était supposé être plus pratique et m’épargner la corvée du recopiage sur Word de mes brouillons manuscrits… et ça n’a pas marché pour moi. J’écris mieux, et bien plus longtemps, avec mon éternel stylo plume et un carnet. Je ne pensais pas qu’un support pouvait à ce point influencer notre pratique et pourtant… certains seront entraînés par le rythme des touches de clavier percutées frénétiquement, l’esprit suivant le tempo de ce métronome déréglé, d’autres comme moi seront d’avantages inspirés par le toucher d’un papier de bonne qualité ou par le son feutré de la plume qui le griffe.

 

Ensuite, et bien que ce soit simple à dire, ça ne sera pas si évident à mettre en application: arrêter de se comparer, que ce soit aux autres, à ce qu’ils font, à l’allure à laquelle ils le font … juste, arrêter de se comparer. On est tous différents, différents dans nos rythmes de travail, dans nos centres d’intérêt, dans nos facultés … Chacun a ses points forts et faibles, alors plutôt que de se focaliser sur ses points faibles et de se déprécier à travers eux, prendre le temps de découvrir et apprécier ce qui peut constituer un atout, une force.

Et enfin, il va falloir arrêter de se juger, arrêter de chercher des défauts à son travail, de se dire « je ne suis pas assez, ce que j’ai fait n’est pas assez« , arrêter d’être son propre ennemi et apprendre à être fier de ce que l’on fait, de ce que l’on accomplit, sans condition. Ce que l’on créée reflète qui on est, et personne ne pourra le faire à notre place. Alors soyons fiers.

 

ecrire 4Que tous ceux qui ont vu cet article résonner avec leurs propres expériences n’hésitent pas à partager leurs craintes, leurs difficultés, leurs conseils ! Avez-vous vous aussi rencontré des blocages de ce genre qui vous ont entravés dans la réalisation de vos rêves, de vos passions ? Comment les avez-vous surmontés ? La discussion est ouverte.

 

 

 

 

À bientôt pour un nouvel article ! En attendant, vous pouvez me suivre également sur Instagram ou venir lire mon précédent article, un compte-rendu de ma lecture de Djinn, un Trou Rouge entre les Pavés Disjoints .

Merci pour votre visite !

 

Marie.

 

6 commentaires sur “La Peur d’Écrire

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