Ecrire : quand tu confies ton roman à ses tout premiers lecteurs #2

Il y a quelques temps, j’inaugurais sur ce blog une petite série d’articles consacrés à l’écriture avec un texte nommé « Quand tu confies ton roman à ses premiers lecteurs » . N’étant pas une experte dans le domaine, je me voyais mal venir t’abreuver de conseils pour écrire un roman, et c’est pour ça que j’ai plutôt choisi de t’embarquer avec moi dans « l’après », pour découvrir ensemble ce qu’il se passe après avoir atteint l’objectif d’achever l’écriture d’un roman. Parce que c’est vrai quoi, que faire une fois que le manuscrit est terminé et qu’on a posé son point final ? Planqué dans un tiroir et on passe à autre chose ? On envoie le truc chez les grands éditeurs en espérant que ça passe ? On auto-édite ? Quoi, quand, comment, dans quel ordre ? Chacun bien-sûr est libre de faire ce qu’il veut de son manuscrit. Pour moi c’était clair : je vise la publication (en revanche, ce qui demeure encore assez flou c’est de choisir entre édition dite « classique » et autoédition) Mais voilà, pour atteindre ce nouvel objectif de la publication, il y a encore de nombreuses étapes, et c’est là que cette série d’articles prend naissance. Je t’ai épargné le récit de plusieurs mois de relectures et corrections, pour en arriver directement à quelque chose de plus croustillant.

Dans le premier article, on a parlé un peu de la prise de décision, ce moment de bascule où les choses deviennent tout à coup plus concrètes, mais aussi de protection de manuscrit, une étape très importante à ne pas sacrifier sur l’autel de la hâte et de l’excitation ! Cette fois-ci, je vais te parler de ce moment terrifiant où j’ai osé envoyer mon texte à ses premiers lecteurs, et surtout de celui où j’ai reçu les premiers retours de lecture …

En route !

Et ça y est, c’est envoyé. Nul retour en arrière possible désormais. Au total, si je fais le compte correctement, j’aurai envoyé ce texte à dix bêta-lecteurs, plus ou moins proches, en plusieurs salves. Certains sont des amis, d’autres des collègues (je suis libraire), d’autres encore sont des inconnus que je n’ai jamais rencontrés et avec qui je n’ai échangé que dans le cadre de cette lecture.

J’ai eu beau m’y préparer, laisse-moi te dire une chose : c’est long. L’attente est longue. Enfin non, objectivement non, parce que ça prend forcément du temps de lire un roman, encore plus quand tu en fais une lecture méticuleuse pour après pouvoir fournir un compte-rendu, donc tout est normal, mais même en ayant conscience de ça, et en ayant répété mille fois à tout le monde « prend tout ton temps, rien ne presse, c’est déjà génial d’avoir accepté de m’aider », et bien tu aimerais avoir des retours tout de suite, genre le lendemain (et idéalement, qu’on te décerne le Goncourt dans la foulée).

Donc voilà, un jour je suis seule à mon bureau face à un manuscrit en travaux, et un autre jour je suis seule aussi, mais face à ma boîte mail à attendre d’avoir des nouvelles de mes bêta-lecteurs. Et disons-le, c’est relativement angoissant de se dire que ça y est, le roman est entre d’autres mains que les tiennes, il y a pour la première fois des gens qui vont le lire (et le juger, comble de l’horreur), et il n’y a rien que tu puisses y changer. Pire, tu as tout fait pour en arriver là. Tout ce qui adviendra par la suite, tout ce que tu risques de te prendre dans la figure, tu l’as cherché. Tu l’as voulu. Enjoy.

Bref, c’est long. (Ici, je vais faire un bond dans le temps de quelques mois, histoire de récolter tous les retours de lecture et de pouvoir les confronter. Peut-être qu’il faudrait que je te parle de la joie, de fierté et de l’angoisse que ça a été quand j’ai reçu mon tout-tout premier retour, mais cet article risque déjà d’être long !)

Nous revoici donc, quelques mois plus tard. Par email, au téléphone, autour d’un café, j’ai finalement récupéré l’avis de chacun de mes lecteurs. Et ce qu’on peut dire, c’est qu’il y a de la diversité ! Tout d’abord dans la forme : certains m’ont fait un retour succin, un résumé de leurs diverses impressions au cours de la lecture, certains m’ont fourni une liste détaillée de tout ce qui, selon eux, mériterait d’être revu, et j’ai aussi reçu quelques relevés de coquilles et diverses fautes égarées le long du manuscrit … Cette diversité des formes s’explique par le fait que je n’ai pas imposé de marche à suivre à mes bêta-lecteurs : je ne leur ai pas donné de questionnaire à remplir, je ne leur ai rien demandé de spécifique, je voulais simplement découvrir comment mon texte pouvait être perçu par différentes personnes, et laisser chacun libre de revenir me parler de ce qui lui a semblé important. Et après avoir recueilli les avis, j’ai complété par quelque questions plus précises concernant des aspects du texte qui me paraissaient potentiellement problématiques (est-ce que tel trait de caractère chez ce personnage se ressent assez bien dans le texte ? Est-ce que le sous-entendu à la fin du chapitre 8 se comprend assez facilement ? Trop facilement ? Est-ce que tu as trouvé la tournure de tel évènement décevante ? etc.) Au final, j’ai donc obtenu les points de vue de mes lecteurs sur le roman, découvrant à l’occasion que chacun peut être marqué par des aspects bien différents de l’histoire, et j’ai également obtenu des réponses concrètes concernant certains points sur lesquels je conservais quelques doutes. Génial ! Et vraiment, quel bonheur (et quelle surprise !) de voir mon roman s’animer à travers la lecture de personnes qui le découvrent pour la première fois et qui, par leur subjectivité, apportent chacune un éclairage nouveau à un texte que je croyais connaître par cœur …

Plus concrètement, j’ai distingué trois types de retours parmi ceux que j’ai pu avoir (sachant que dans les faits, on retrouve un peu de ces différents types dans chaque retour, mais dans des proportions qui varient).

  • Le « trop parfait » : que du positif, que des compliments. Quelques remarques formelles du type « il manque une majuscule page 41 », mais en dehors de ça, la personne peine à trouver du négatif. Ce type de retours, je l’ai eu essentiellement de la part de lecteurs qui font partie de mes proches. Je vois deux raisons possibles à cela : soit le fait de savoir que c’est moi qui ai écrit ce texte les empêche d’avoir un point de vue purement objectif et neutre, et dans ce cas effectivement ils ne voient que du positif partout et tout est merveilleux, soit il y a tout de même des points plus mitigés (voire franchement négatifs) à signaler, mais ils n’osent pas en parler par peur de décevoir, de faire de la peine … ou d’affronter mon mauvais caractère (et comment leur en vouloir ?) Ces avis-là, débordants de bonnes intentions, je les conserve bien précieusement pour rassurer mon égo fragile dans les moments de doute, certains jours ça me fait un bien fou de les relire (parce que ça reste toujours extrêmement flatteur et qu’à les écouter, c’est le Goncourt qui n’est pas assez bien pour moi et non l’inverse !). Malheureusement, je ne peux pas vraiment oser me fier à eux pour évaluer la véritable valeur de mon texte.
  • Le « à côté de la plaque » : celui-là, un peu particulier, je n’en ai en réalité reçu qu’un seul. Et je ne sais pas trop qu’en dire, si ce n’est qu’il m’a brièvement fait tout remettre en question (« mon texte est vraiment si incompréhensible que ça ?) avant d’en arriver à la conclusion suivante : la personne a, au mieux, lu mon texte en diagonale pour me faire plaisir, mais n’a donc rien compris (ou presque). Cet avis-là, malheureusement, n’a pas été des plus utiles.
  • Le « professionnel » : et je dis « professionnel » non pas nécessairement parce que la personne vient du milieu du livre et donc s’y connait, mais surtout parce qu’elle a su adopter un regard purement objectif et détaché et a lu mon texte sans penser à la personne qui était derrière … et ça se sent dans son compte-rendu. Toujours dans la bienveillance, la personne préfère s’appesantir sur ce qui selon elle ne convient pas, parce que oui, pour elle des points négatifs il y en a ! Ces avis-là n’ont pas été les plus faciles à digérer (R.I.P. le peu de confiance en moi que j’avais réussi à me constituer), certaines des remarques qui m’ont été faites m’ont même sacrément miné le moral pendant quelques jours, mais ce sont les avis les plus précieux que j’ai pu avoir et je suis extrêmement reconnaissante envers les personnes qui ont eu le cran de les formuler ! Car chaque commentaire négatif ouvre en fait sur une nouvelle piste, une potentielle voie d’amélioration. Ca t’ouvre les yeux sur des choses que tu n’avais même pas forcément repérées. Evidemment, tu restes libre de tenir compte ou pas de toutes ces remarques, les bêta-lecteurs émettent des suggestions, et si la plupart sont constructives, vouloir te conformer à tout ce qu’on t’a dit risque de desservir ton roman et de t’éloigner de la direction que tu souhaitais prendre au départ. Et puisqu’on ne peut de toute manière pas plaire à tout le monde, autant faire le tri dans ce matériau riche que tes premiers lecteurs t’ont offert pour ne conserver que ce qui te permettra d’atteindre la meilleure version possible du roman que tu avais imaginé.

Pour conclure cet article, je remercie encore une fois chacune des personnes qui ont donné de leur temps pour lire mon manuscrit et qui ont accepté de me livrer leur avis. Votre aide et votre soutien me sont infiniment précieux, quelle chance j’ai d’avoir un jour croisé votre route !

Si cet article t’a plu, tu peux venir lire d’autres textes dans la rubrique Ecrire en attendant la suite qui sortira bientôt (sachant que chez moi, « bientôt » ça peut vouloir dire « dans six mois »). Et inutile de préciser que je serai plus que ravie si tu souhaites venir partager ton expérience ou me dire ce que tu en as pensé dans les commentaires !

À bientôt,

Marie.

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